05 décembre 2007

Athénée, Rondelet, Oppien :
La Maman des poissons...




Shiira is a Japanese open source project based on the KHTML rendering engine of Apple’s Webkit for Safari.”



Cherchant à m’informer au sujet du navigateur Shiira 「シイラ」, je trouve ceci :



Shiira est le mot japonais désignant la coryphène. L’icône de l’application représente une coryphène flottant sur une bulle d’eau.


http://fr.wikipedia.org/wiki/Shiira

Lacune : « coryphène » ne me dit rien.






Je m’informe derechef :




Le coryphène[1] (du grec κορύφαινα, ichtyologie[2]) ou dorade coryphène ou mahi-mahi est un poisson que l’on peut trouver dans les régions tropicales et subtropicales de tous les océans, et occasionnellement en Méditerranée.

1.↑ Mot masculin, d’après le TLFi.

2.↑ http://atilf.atilf.fr/dendien/scripts/fast.exe?mot=coryph%E8ne


http://fr.wikipedia.org/wiki/Coryphaena_hippurus



N’en croyant pas mes yeux, je suis le lien :






CORYPHÈNE, subst. masc.

Poisson des mers chaudes, aux couleurs métalliques très brillantes, et qui peut être de grande taille. Synon. usuel daurade. Un ou deux coryphènes aux brillants reflets (dorades des marins) sont devenus nos fidèles compagnons de voyage (Dumont d’Urville, Voy. autour du monde, t. 4, 1832-34, p. 662).

Prononc. Seule transcr. ds Land. 1834 et Gattel 1841 : ko-ri-fè-ne. Étymol. et Hist. 1735 lat. sc. coryphaena (Linné Syst. Nat. [éd. 1830], p. 72); 1798 coryphène (Cuvier Hist. nat., p. 355). Empr. au gr. κορύφαινα, ichtyologie. Fréq. abs. littér. : 1.



http://www.cnrtl.fr/lexicographie/coryph%E8ne?

Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales





Le CNRTL ne fait que citer, tel quel, le Trésor de la Langue Française informatisé. Erreurs en cascade. (Stricto sensu, « coryphène » et « daurade » ne sont pas synonymes.)



***










(On remarquera, chez G. Rondelet, « Quant à moi, je n’ai vu jusqu’ici en Espagne que du fretin (de la blanchaille, des alevins) » Ego quidem in Hiſpania tantum natos vidi, fierté du témoin qui ne s’est pas contenté de la lecture d’Aristote — qu’il connaît bien. Le poisson que Théodore de Gaza appelle equiselis est une variété plus petite de coryphène. Sur un autre plan, l’imprimeur a eu du mal avec sa lettrine obligatoire et a dû reporter à droite de la capitale initiale l’esprit et l’accent qui vont à sa gauche.)



Ci-après extrait d’Athénée dans l’édition de Georg Kaibel chez Teubner (1887), suivi de traductions par Lefebvre de Villeneuve et C. D. Yonge.















Kορύφαινα est la forme grecque ancienne, que les savants ont transcrite en latin coryphaena, d’où « cory-phène » ; une chose est certaine : le mot ne risque pas d’avoir voulu dire « ichtyologie » (qui n’est pas attesté avant 1649). Le poisson a été désigné par un élément considéré comme caractéristique, sa nageoire dorsale, évoquant une crête, une houppe, un cimier : κορυφή « tête » (d’où, via un dérivé, notre « cory-phée »), κορυφαία « touffe de cheveux du sommet de la tête, houppe » [l’hypothèse d’un composé κόρυς
« casque » + le radical de φαίνειν « apparaître, ressortir » n’est pas à retenir].

Comme souvent dans le vocabulaire de la faune et de la flore, on constate une multitude de variétés et de désignations.

La daurade lampuge (cast. lampuga, cat. llampuga ; sans étymologie) — 58-66 rayons, pelvienne pigmentée, anale à bord concave, pectorales longues, plaque ovale de dents (plurisériées en bande) sur la langue — avait d’autres noms, plus courants (semble-t-il) que κορύφαινα : ἵππουρος (« queue de cheval », qualifié de ἀρνευτής « bondissant comme un agneau » ; d’où hippurus chez Ovide et Pline), avec variante ἱππουρεύς ; à partir de là, un féminin non-attesté *ἵππουρα, ancêtre de l’actuel τσιπούρα (haplographie pour τσιππούρα ?) « daurade royale, sourcils d’or (χρύσοφρυς, Sparus aurata) ».









Tσιπούρα η [tsipúra] O25 : ψάρι με πλατύ σώμα και με γκρίζο, ασημί χρώμα, που το ψαρεύουν για το πολύ νόστιμο κρέας του. Tσιπουρίτσα η YΠOKOP. [μσν. τσιπούρα ίσως < *ἵππουρα θηλ. του αρχ. ἵππουρος με ανάπτ. αρχικού [ts] από συνεκφορά με το άρθρο της, τις· τσιπούρ(α) -ίτσα]. Source : Λεξικό της Κοινής Νεοελληνικής, de Manolis Triandaphyllidis (Μανόλης Τριανταφυλλίδης, 1883-1959)



Mais, si j’ai bien compris, cette restitution ne fait pas l’unanimité:





Πάμε παρακάτω• η τσιπούρα πήρε το δεύτερο πι (τσιππούρα) που την κάνει να μην τρώγεται, επειδή σύμφωνα με μια άποψη προέρχεται από τη συμπροφορά της ιππούρας > τ’σ’ιππούρας. Το πόσο αμφίβολη είναι αυτή η εξήγηση φαίνεται από το ότι ο τύπος ιππούρα είναι αμάρτυρος, οι αρχαίοι είχαν αρσενικό ίππουρος, και αυτός ο ίππουρος σήμαινε άλλοτε μεν ψάρι άλλοτε δε έντομο. Κι όμως, αυτή η επισφαλέστατη ετυμολογία θεωρείται ικανή αιτία για να ανατραπεί μια ακόμα καθιερωμένη ορθογραφία.


http://www.sarantakos.com/language/tshrwto2.html



Nikos Sarantakos (Νίκος Σαραντάκος), « Τσηρώτο στον κροκόδιλο, στυφάδο στον καρμοίρη »,

Κριτική της ορθογραφικής πολιτικής του λεξικού Μπαμπινιώτη (critique des prescriptions orthographiques du dictionnaire de Georgios Bambiniotis [Γεώργιος Mπαμπινιώτης], « Λεξικό τής Nέας Eλληνικής Γλώσσας »)


***



Une des plus anciennes représentations de daurade coryphène, remontant à l’époque minoenne, se trouve sur Théra (Θήρα), île principale de Santorin, dans les Cyclades. Les archéologues ont dégagé, dans le chantier de fouilles d’Akrotiri (Ακρωτήρι), des fresques murales (τοιχογραφίες) parmi lesquelles, dans la Maison ouest – chambre 5 – mur nord, celle dite du pêcheur, montrant un jeune homme tenant à chaque main un lien auquel sont accrochés des poissons par les ouïes. Voici l’identification exposée par le professeur P. S. Economidis (Π.Σ. Οικονομίδης), ichtyologue :







The fish featured in the picture can be classified without doubt as belonging to the family Coryphaenidae and to the species Coryphaena hippurus or common dolphinfish, which is known in Greek seas under the names κυνηγός, λαγός, σύρτης, λαγιάδα, λαμπούγα and μανάλι (Economidis 1973, 514), some of which are of Italian or Spanish origin. Another species, Coryphaena equiselis or pompano dolphinfish, is also observed in Greek seas, but very rarely. These species are the exclusive representatives of this family, distributed throughout almost all tropical and temperate ocean zones and in closely related seas. The principal characteristics which distinguish these two species are: (a) the body of the common dolphinfish is shallower, its greatest depth (H) being equal to, or less than, 25% of the standard length (SL) of the body, while in the pompano dolphinfish this depth is equal to, or more than, 25%; (b) the dorsal fin of the former species has 58 to 66 rays, while in the latter species this number varies from 52 to 59; (c) the lateral line has, respectively, more than 200 scales and less than 200 scales; and (d) the free margin of the anal fin of Coryphaena hippurus is concave, while in Coryphaena equiselis it is convex. The specimens held by the ‘Little Fisherman’ have a really quite shallow body, and the anal fin, where visible, has a relatively concave free margin, thus indicating that these are Coryphaena hippurus. Moreover, the colours of live specimens of the species are very bright, varying from blue to blue-green on the upper part of the body and from whitish to yellow on the lower part. These colours can quite easily be recognised in the picture. It seems that the only free artistic invention made by the painter of the ‘Little Fisherman’ is the presence of two rows of black spots, visible in all the depicted specimens, which are absent from the live fish. Probably, the painter wanted to draw the two existing intermediate zones in the body colours, one near the first row of spots between the dark blue of the upper part of the body and the lighter blue to blue-green of the sides, and the other between this and the whitish to yellow colour of the belly. There are some black or blue spots on live specimens, but these are dispersed irregularly along the sides (Bauchot 1987, 1070-1071).


therafoundation.org/articles/environmentflorafauna/thelittlefishermanandthefishheholds








Le spécialiste note par ailleurs que ‘given that the fish is regarded as a delicacy, it was probably not for common consumption but eaten by the rich rather than the poor’; on comparera avec la remarque finale des rédacteurs du Diccionario de la lengua española de la Real Academia Española, entrée lampuga :





Pez marino del orden de los Acantopterigios, de cuerpo comprimido lateralmente y que llega a un metro de longitud. Dentro del agua aparece todo dorado, a pesar de que por el lomo, que es casi recto, es verde con manchas de color anaranjado, y por el vientre, plateado. La aleta del lomo, que corre desde el medio de la cabeza hasta la cola, es amarilla con una raya azul en la base; la de la cola es verde, y las restantes, enteramente pajizas. Es comestible, pero se aprecia poco.




***





« Les pêcheurs rassemblent des roseaux et en font des fagots qu’ils jettent dans les vagues et au-dessous ils attachent une lourde pierre pour servir de lest. Ils laissent tout ceci flotter doucement au gré des flots et immédiatement, l’ombre attire des groupes de dorades coryphènes qui se rassemblent en bancs et s’attardent autour béatement en frottant leur dos contre les roseaux. Puis les pêcheurs rament vers elles pour trouver une proie disponible, appâtent leurs hameçons et les jettent à l’eau, les poissons s’en saisissent précipitant ainsi leur propre destruction. »


C’est ainsi que le poète romain d’origine sicilienne Oppian, décrit, 200 avant Jésus-Christ, dans son ouvrage « Halieutica » la pêche des dorades coryphènes sous les premiers dispositifs de concen-tration de poissons (Oppian, traduit du grec par J. Jones, 1722).


Marc Taquet, Le comportement agrégatif de la dorade coryphène (Coryphaena hippurus) autour des objets flottants [Thèse de doctorat de l’Université Paris 6, océanologie biologique, 2004 ; l’auteur est spécia-liste en ichtyo-écologie tropicale à l’Ifremer]



Malgré Ὀππιανός et Oppiānus (que suit l’anglais Oppian), la forme française est Oppien.



***




Coryphènes





Poissons allongés, comprimés ; profil de la tête se modifiant au cours de la croissance, et mâles adultes développant une crête osseuse frontale. Grande bouche ; dents fines, nombreuse, disposées en bandes sur les mâchoires, le vomer et les palatins (voûte buccale) et sur la langue. Dorsale et anale très longues, se prolongeant presque jusqu’à la caudale, sans épines acérées ni pinnules ; origine de la dorsale sur la nuque, origine de l’anale au milieu du corps ou légèrement en avant, pectorales courtes, falciformes ; pelviennes se logeant dans un sillon sur la face ventrale ; caudale profondément fourchue, sans aucune carène sur la nageoire ou sur le pédoncule caudal. Petites écailles cycloïdes (lisses) ; liane latérale avec une courbure accentuée au-dessus des pectorales. Coloration : dos bleu-vert métallique brillant à l’état vivant, virant rapidement au gris-vert après la mort, flancs argentés à reflets dorés, avec de nombreuses taches noires punctiformes ; dorsale sombre ; anale sombre bordée de blanc chez C. hippurus, claire chez C. equiselis.






Elles se rassemblent en petits groupes sous les épaves flottantes. […] Elles sont commercialisées fraîches ou réfrigérées et leur chair est très appréciée.



Texte et illustration de Marie-Louise Bauchot (Laboratoire d’ichtyologie générale et appliquée, Muséum national d’Histoire naturelle, Paris), Fiches FAO…, vol. II, 1987, p. 1070.









Cette chronique est disponible en téléchargement gratuit au format d’Acrobat Reader (extension .pdf) d’Adobe à l’adresse suivante:

http://www.toofiles.com/fr/oip/documents/pdf/quos_aro.html






Libellés : , , , , ,