18 janvier 2007

Tobias Smollett, Humphry Clinker : une peine afflictive

Roman épistolaire, Humphry Clinker (1771) s’ouvre sur un échange de lettres entre un pasteur gallois et un bookseller (à la fois éditeur et libraire, à l’époque) de Londres, portant sur la correspondance qui constitue l’ouvrage proprement dit et que le pasteur cherche à vendre, mais il appréhende certaines conséquences fâcheuses d’une condam-nation judiciaire :



“Finally, if you and I should come to a right understanding, I do declare in uerbo sacerdotis, that, in case of any such prosecution, I will take the whole upon my own shoulders, even quoad fine and imprisonment, though, I must confess, I should not care to undergo flagellation: Tam ad turpitudinem, quam ad amaritudinem pœnæ spectans.”
« Enfin, si nous parvenons à un accord équitable, j’affirme qu’aussi vrai que je suis prêtre, en cas de telles poursuites [contre nous], je m’engage à porter tout le faix sur mes propres épaules, y compris l’amende et l’emprisonnement, bien que, je dois l’avouer, je ne sois pas disposé à subir la peine du fouet : Tam etc. »


Les éditions se partagent entre pœna et pœnæ. D’où, suivant le cas, deux façons de comprendre :
« châtiment (pœna) visant à infliger autant la honte (turpitudo) que la douleur cuisante (amaritudo) » ;
« considérant (spectans) à la fois la honte (turpitudo) et la douleur cuisante (amaritudo) du châtiment (pœnæ) ».

La première construction me semble du latin classique de meilleure facture (mais le texte latin est sans doute de la plume de Smollett ; dès lors, que vaut l’argument ?).
La seconde correspond mieux au profil psychologique esquissé dans la lettre, qui présente le pasteur comme un peureux qui se défend de l’être (des reproches véhéments lui donnent la diarrhée, qu’il met sur le compte des œufs de poisson — roe, écrit row — qu’il vient de manger, citant Galien « Περὶ ἰχθύς » à l’appui de ses dires).


Quoi qu’il en soit, la solution n’est pas à chercher dans l’édition procurée par Angus Ross, qui explique la citation latine — avec pœnæ — de la façon suivante (The Penguin English Library, 1967, note p. 397) :
“making the punishment fit the crime.”
Qui dit mieux ?

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