04 décembre 2006

Tristram Shandy :
Christ-cross-row, τύπτω-ing it

Tristram Shandy, tome 3, volume 5, chapitre 42:

“—Five years with a bib under his chin;

Four years in travelling from Christ-cross-row to Malachi;

A year and a half in learning to write his own name;

Seven long years and more τύπτω-ing it, at Greek and Latin […].”


‘Christ-cross-row’ = horn-book, primer, « abécédaire »; prononcé Chris’-cross row (il en reste ‘criss-cross’). Cf. dans Richard III (I, II), Clarence racontant à Gloucester comment le roi “from the cross-row plucks the letter G”, et le dicton de l’époque Tudor “And if you know the Christ cross row, you soon may spell and read” (où “and if” = “if”).
En France, l’équivalent s’appelait croix de par Dieu ; voici l’explication fournie par Fure-tière (1690) :
« une croix qui est au-devant de l’alphabet du livre où l’on apprend aux enfants à connaître leurs lettres. On le dit aussi de l’alphabet même et du livre qui le contient
Exemple : Monsieur de Pourceaugnac (1669), I, V, l’Apothicaire s’adressant à Eraste :
« Ma foi, ma foi, vous ne pouviez pas vous adresser à un médecin plus habile ; c’est un homme qui sait la médecine à fond, comme je sais ma croix de par Dieu ; et qui, quand on devrait crever, ne démordrait pas d’un iota des règles des Anciens. »
Sterne invente un verbe gréco-anglais et le conjugue (avec, peut-être, un jeu de mots avec ‘tiptoe’ selon Melvyn New et Joan New). Tύπτω (« je frappe ») servait de paradigme de conjugaison ; sans doute est-ce pour cette raison que Montaigne (I, XXV Du pedan-tisme) se sert du même exemple :
« Et dict qu’il en fut foité, tout ainsi que nous sommes en nos vilages pour avoir oublié le premier Aoriste de τύπτω. »
L’Université de Chicago (artfl.uchicago.edu)
et Wikisource (fr.wikisource.org)
donnent la forme aberrante tuptao.

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